Bora Bora

À Bora Bora l’équipe intervient depuis 2020 pour la création d’une Aire Marine Gérée localement. Après plus de six mois d’enquêtes et de diagnostic, le projet amorce en 2021 une phase de concertation visant à définir le périmètre et les modalités de gouvernance du futur rāhui.

10549

habitants en 2017

38 km²

de terres émergées

110 km²

de lagon

Bora Bora est située dans l’archipel de la Société (îles sous le vent), à 250 kilomètres au nord-ouest de Tahiti. L’île, vestige d’un volcan aujourd’hui effondré, est entourée d’un lagon qui communique avec l’océan via une unique passe, ou ava, la passe de Teavanui.

Célèbre pour son lagon et ses bungalows sur pilotis, elle est un des hauts lieux du tourisme de luxe dans le monde. Elle accueille chaque année plus de 100 000 touristes internationaux et représente à elle seule plus de la moitié du Produit Intérieur Brut généré par le tourisme sur le territoire.

Le tourisme exerce une pression importante sur l’environnement, en particulier sur les espaces lagonaires, mais il représente aussi une opportunité pour un développement durable du fait des retombées économiques qu’il produit. Bora Bora est ainsi l’une des 10 communes polynésiennes (sur 48) qui distribue de l’eau potable sur l’ensemble de son réseau. Elle a également mis en place un système unique en Polynésie française d’assainissement des eaux usées (y compris sur les motus – petits ilôts). Grâce au traitement de ses eaux grises elle reçoit chaque année, depuis 15 ans, le label Pavillon Bleu qui garantit une bonne qualité des eaux.

Pourtant, présenté comme très poissonneux dans les années 1970, le lagon de Bora Bora aurait connu une baisse significative de ses stocks depuis plusieurs années. Les prises seraient plus petites et moins nombreuses ; en témoigne selon certains, la vente de plus en plus importante de poissons de lagon en provenance de Tahaa.

Pour préciser la situation réelle, l’équipe du centre de ressource dédié au Rāhui en Polynésie française a donc mené, en 2020, plusieurs actions pour évaluer l’état écologique du lagon et identifier les principaux enjeux locaux.

CE QUE NOUS AVONS FAIT

Évaluer l’effort de pêche via des enquêtes de bord de route

Entre juillet et décembre 2020 nous avons mené une enquête en bord de route pour estimer les volumes de vente de poissons de lagon. Pour compléter ce travail nous avons réalisé une veille sur les réseaux sociaux pour identifier les ventes dématérialisées de l’ensemble des produits issus du lagon. Ce travail vise également à estimer les potentielles répercussions de la crise liée à la COVID-19 sur la pression de pêche. Nous avons également interrogé des consommateurs pour caractériser et mesurer la fréquence de consommation de poissons de lagon.

Ce travail a permis de collecter des données d’ordre qualitatif et quantitatif sur les espèces pêchées, sur les tailles des poissons, sur les techniques de pêche mobilisées, etc.

Mieux connaître la pêche à Bora Bora et ses évolutions

En juillet et août 2020, l’équipe a mené une enquête pour mieux comprendre les pratiques et techniques de pêche ainsi que les ressorts de l’organisation sociale liées à ces pratiques. Une trentaine d’entretiens ont été conduits (soit plus de 28 heures de discussions enregistrées) auprès d’hommes et de femmes. L’équipe constitué de linguistes et anthropologues, a collecté des mythes et légendes locaux, établi une cartographie collaborative du lagon à partir des toponymes ou noms vernaculaires, recenser et caractériser différentes techniques de pêche, etc.

Les toponymes peuvent révéler des informations sur (i) les caractéristiques physiques ou géographiques des lieux, (ii) sur les règles sociales, formelles ou informelles, qui régissent certains espaces, (iii) sur l’intérêt ou le rôle joué par certains sites (site de recrutement ou nurserie de poissons, présence de certaines espèces, etc.).

Les entretiens seront disponibles sur la plateforme linguistique Anavevo / Paradisec, dédiée à l’archivage et la consultation oral d’enregistrement réalisés dans des langues de Polynésie française.

Établir un état des lieux écologique des écosystèmes récifo-lagonaires et suivre les dynamiques évolutives

Nous avons mis en place un protocole d’évaluation et de suivi de l’état écologique du lagon de Bora Bora. Nous avons concentré nos efforts sur la caractérisation des évolutions des écosystèmes coralliens de l’île depuis 2006 : nous avons réalisé ce travail à partir de données disponibles collectées dans le cadre d’autres projets de recherche et de nouvelles données collectées par notre équipe depuis 2019. Nous analysons en particulier les caractéristiques et les évolutions de la biodiversité lagonaire via différents paramètres tels que : la densité et la biomasse des poissons commerciaux ou non commerciaux et des macro-invertébrés (vana, rori, etc.), l’identification et la qualité du substrat, l’évolution du trait de côte, la localisation des nurseries, la pollution sonore, etc.

Les résultats de ces analyses aideront à concevoir des stratégies de conservation et de gestion adaptées au contexte local.

Évaluer les impacts du tourisme sur l’environnement lagonaire

Entre janvier et mars 2020 nous avons mené un travail pour caractériser les impacts des activités touristiques sur les espaces lagonaires. Nous avons en particulier analysé (i) le rôle joué par les opérateurs touristiques dans la gestion et la protection du lagon, (ii) la gouvernance pour l’accès et l’organisation des espaces lagonaires, (iii) les mécanismes de promotion des patrimoines culturels matériels liés au lagon et à la biodiversité marine.

Ce travail a permis, entre autres, d’identifier les conflits d’usages entre les différents usagers du lagon, d’identifier les instances et les mécanismes formels et informels de régulation à l’œuvre. Ces données sont précieuses pour formuler des scénarios de gestion dans le cadre d’un futur rāhui.

CE QUE NOUS PRÉVOYONS DE FAIRE

Sur la base des travaux menés en 2020, nous prévoyons de mener une campagne de concertation avec les principales parties prenantes de Bora Bora pour :

  • arrêter un périmètre d’aire marine gérée ou de rāhui ;
  • définir un cadre légal adapté ;
  • préciser les règles qui s’appliqueront à l’échelle du rāhui en précisant éventuellement les modulations par secteur ;
  • concevoir la gouvernance du projet pour asseoir la légitimité du projet et garantir son efficacité.